Patrimoine rural et réhabilitation

Discret, parfois oublié, le patrimoine rural est le témoin de l’histoire des territoires. Réhabilités, lavoir, église et moulin retrouvent leur âme.

Des lavandières trempant leur linge aux minotiers guettant leurs moutures, il est des gestes et des métiers d’un quotidien révolu ; « la Seine-et-Marne regorge de petit patrimoine rural, comme ses 450 lavoirs», indique David Lefrant, chargé de mission à Union Rempart. « Il est malheureusement très souvent délaissé… » Jusqu’à croiser des énergies et bonnes volontés qui décident un jour de le remettre debout.

À Gouvernes, la rénovation des lavoirs datant du XIXe a également été initiée par une association locale et encadrée techniquement par une autre association dédiée à la sauvegarde du patrimoine, Rempart Ile de France. «Les travaux ont porté sur la maçonnerie et la charpente : dépose de la couverture, remplacement d’éléments de charpente et restauration des murs », rappelle Angéline Martin, coordinatrice de chantier de l’association. L’été 2006, une dizaine de jeunes bénévoles inexpérimentés sont venus nettoyer, maçonner, scier, rénover l’un des trois lavoirs de la ville, encadrés par les animateurs de Rempart : un technicien, garant des savoir-faire de la construction, et un chargé de la coordination du groupe », continue-t-elle.

Aux élans communautaires se combinent aussi des engagements politiques; la réhabilitation du Moulin Russon à Bussy-Saint-Georges en est un bel exemple. Édifié au XVIIe, industrialisé au XIXe, le moulin s’est arrêté de tourner en 1911. Son rachat par la Communauté d’agglomération de Marne et Gondoire, en 2002, va remettre son destin en route. Une réhabilitation complète est engagée qui s’étendra sur deux ans comprenant sa réfection intérieure et la remise en état de son mécanisme.

La rénovation est confiée à l’entreprise angevine Croix, charpentier amoulageur depuis 6 générations ; « c’est un métier qui disparaît », lance Thierry Croix, à la tête de l’entité familiale. Ni école ni diplôme, son savoir est empirique et se transmet oralement. « La science du moulin ? C’est une connaissance spécifique autour des essences de bois qui diffèrent selon les pièces : le chêne sans nœuds pour la roue et les gros éléments, le cormier pour les dentures des engrenages… Et puis il faut donner la bonne vitesse de rotation à la roue qui conditionne la qualité d’une farine ; au fil des générations, nous avons établi nos tables. Peu d’artisans détiennent ce savoir », explique-t-il. Aujourd’hui, le moulin Russon est un musée pédagogique qui reçoit environ 14000 visiteurs chaque année, et, une fois par mois, à l’abri des regards des visiteurs, il renoue même avec la tradition meunière…

Peu d’artisans savent à quelle vitesse doit tourner une roue pour un bon travail des meules.

Lorsque les animateurs du moulin Russon se sont pris de passion pour la meunerie avec l’idée de produire leur farine, le challenge n’a pas été aisé. Il leur a fallu 8 ans pour apprendre le métier et obtenir le Certificat de Qualification Professionnelle en meunerie. D’autant qu’ici, la mouture se fait à l’ancienne, sans électricité. Chaque mois, durant trois jours, le bruit assourdissant et continu du fer et du silex envahit l’édifice aussitôt saturé de poussière de farine. Des conditions de travail difficiles et le plaisir de perpétuer les gestes comme de fabriquer les 80 kg de farine proposés à la vente.

Un rempart à sauvegarder

Ce mouvement associatif regroupe un réseau de 170 associations locales et régionales engagées sur la réhabilitation et l’animation de monuments, souvent situés sur leur ville ou leur territoire. « Notre conviction? Derrière chaque citoyen peut naître un projet ! Dès lors que 3 ou 4 personnes s’intéressent à un patrimoine, ils peuvent monter leur association et nous solliciter. Nous les accompagnerons dans leur entreprise en fournissant un appui technique et administratif : de l’aide au montage financier à l’organisation de chantiers bénévoles », explique David Lefrant, chargé de mission à Union Rempart.

2500 bénévoles, 400 animateurs, 40 savoir-faire, de la mosaïque au costume en passant par la taille de pierre ou la charpente, constituent la force active de l’association qui comptabilise, depuis sa création en 1966, 900 monuments en péril restaurés sur le principe du chantier bénévole encadré.

Plus d’informations : www.rempart.com

Article extrait du magazine Savoir&Faire – Edition 2016-2017